Crédit photos : Gabriel Fortin
Nuit étoilée (Oiseau jaune blessé ayant péri une nuit d’automne 2012 et préservé du temps dans un cube de plâtre), 2016
Oiseau (paruline), plâtre, oreiller de plumes et perles de rocaille
Utilisé pour sa fonction nocturne pendant trois ans, l’oreiller a été témoin des rêves et des cauchemars de l’artiste. Magnifiée par une transformation ornementale rappelant les grandes occasions, la surface du coussin de plumes a patiemment été recouverte de perles, une à une. Contrastant avec la simplicité formelle de l’objet soutenu par l’oreiller et mettant en évidence toute sa préciosité, le perlage prend un éclat de nuit étoilée sous la lumière. L’œuvre est à découvrir avec émerveillement, comme l’astrophysicien Hubert Reeves qualifie de merveilleux le caractère rassurant de l’observation des étoiles : « la magie salvatrice de ces clins d’œil stellaires ».
Un cube blanc est synonyme d’un espace vide (absence) ou plein (présence). Celui-ci renferme un contenu animal : la dépouille d’une paruline blessée que l’artiste a voulu sauver. Contenant d’une pulsion de survie, le cube témoigne d’un drame à petite échelle. Momifié, décomposé, évaporé, qu’est devenu l’oiseau scellé dans le plâtre pendant ces quatre années? Ayant comme seul témoin oculaire l’artiste, le contenu du cube soulève un questionnement sur les idées de la croyance, du fait et de la véracité, puisque celui qui en voudrait la preuve devrait casser l’objet. Non sans rappeler le principe paradoxal de l’expérience de pensée du « chat de Schrödinger »1 ou encore la valeur du dessin Erased de Kooning (1953) de Rauschenberg, Nuit étoilée souligne la dématérialisation de l’objet en concept. Au fil des années à venir, le sens de l’œuvre gagnera en importance en même temps que prendront place des questions de pérennité, de legs et de valeur matérielle.
1 L’un des piliers de la physique quantique, Erwin Schrödinger, a imaginé une expérience de pensée (tenter de résoudre un problème en utilisant uniquement son imagination) qui avance que « selon le paradoxe du chat de Schrödinger, l’application des règles de la mécanique quantique par un observateur extérieur à une boîte contenant un chat et un dispositif capable de le tuer, déclenché en cas de désintégration d’un atome radioactif, semble conduire à une situation violemment contre-intuitive. Tant que l’observateur n’ouvre pas la boîte, le chat est pour lui dans un état dit de superposition quantique, à la fois mort et vivant.» (Source : http://www.futura-sciences.com)
Dimensions : 10 x 10 x 10 cm (cube) et 15 x 65 x 50 cm (oreiller)
Oeuvre présentée dans l’exposition Témoin oculaire au Centre Bang en 2016.
© tous droits réservés, mariane tremblay, 2016